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Mirbeau is often presented as a writer with contradictions, characterised by the vehemence of his indignation. While the virulence of her attacks may be a rhetoric specific to the press article (as in the satirical newspaper 'Les grimaces'), it lasts throughout her career, regardless of the forms used or capitalised success. However, Mirbeau's pamphleral writing is changing in its form. First defined as the mark of concealment, the 'grimace' gradually becomes the emblem of the work carried out by the romancier. For Mirbeau, the distortion is not an obstacle to the truth, but a process used to reveal it, or even the signature of a writer claiming the right to contradict himself. Self-loyalty cannot therefore be based on a doctrine, nor can it really go through discourse. The novel thus offers Mirbeau a shape paradoxically more in line with his conception of truthfulness. Mystification becomes the means of denouncing the impostures of consistency, as does sarcasm, which literally puts the fable of the narrative into a piece. ; Mirbeau est souvent présenté comme un écrivain plein de contradictions, caractérisé par la véhémence de ses indignations. Si la virulence de ses attaques peut relever d'ne rhétorique propre à l'article de presse (comme dans le journal satirique "Les Grimaces"), elle dure tout au long de sa carrière, indépendamment des formes utilisées ou du succès capitalisé. L'écriture pamphlétaire de Mirbeau évolue néanmoins dans ses modalités. D'abord définie comme la marque d'une dissimulation, la « grimace » devient progressivement l'emblème du travail opéré par le romancier. Pour Mirbeau, la distorsion n'est pas un obstacle à la vérité, mais un processus utilisé pour sa révélation, ou même la signature d'un écrivain revendiquant le droit de se contredire. La fidélité à soi-même ne peut donc pas reposer sur une doctrine, ni vraiment passer par un discours. Le roman offre ainsi à Mirbeau une forme sans doute paradoxalement plus conforme à sa conception de la sincérité. La mystification devient le moyen ...

Cet essai part d'une citation de Philarète Chasles à propos de "La Peau de chagrin" (« Holà ! Messer Gaster, voici votre règne ! ») et envisage le sens, les raisons et le bien-fondé d'une telle exclamation. Associée au triomphe du matérialisme par Chasles, l'allégorie de Gaster permet en effet d'envisager le déploiement, au 19e siècle, d'une vaste littérature de l'estomac confirmant le rôle prépondérant que l'« imaginaire social » du siècle a assigné aux fonctions nutritives et digestives. Par-delà la diversité des champs mobilisés, le principe d'organisation que l'estomac permet d'évoquer ou de justifier témoigne en particulier de la polymathie de la « physiologie » au 19e siècle, à la fois domaine de connaissance spécialisé, méthode d'analyse et d'exposition, « genre » esthétique volontiers parodique, et manière d'appréhender le corps social. La première partie (« Gastronomiana : physiologie du corpus gastronomique ») montre que la littérature de l'estomac se trouve au centre d'un vaste champ de représentations pluridisciplinaires, dont elle fait ressortir les convergences. La première d'entre elles est la mobilisation d'un imaginaire physiologique incarnant le nouvel équilibre entre le corps et la pensée établi au tournant du siècle par les Idéologues, et très largement relayé par un discours gastronomique soucieux de proposer une réflexion sur l'homme en général. La promotion de la gastronomie ne peut néanmoins être séparée de la reconfiguration politique dans laquelle elle s'opère. Présentée comme un moyen de reconstruire l'édifice social et le vivre-ensemble malmenés par la Révolution française, la gastronomie est en effet une pièce maîtresse dans l'affirmation politique de la bourgeoisie : elle symbolise un passage de relais entre l'aristocratie et l'oligarchie, tout en apparaissant comme une création de la société issue de la Révolution, voire l'allégorie d'un ordre nouveau. La physiologie joue un rôle central dans l'édification de cette norme gastronomique, en affirmant la nouvelle centralité de Gaster, ...

Cet article confronte les discours gastronomique et biologique et montre que la physiologie de la digestion peut, au XIXe siècle, être partiellement rattachée aux métaphores organicistes utilisées pour dire le corps social, et juger de sa santé. Dans la « grande opération de la vie » qu'est la digestion, hiérarchie physiologique et hiérarchie politique se répondent. La description structurale et fonctionnelle du vivant confirme alors l'antique fable des membres et de l'estomac, d'ailleurs souvent prise en exemple par les gastronomes comme par les physiologistes.

Cet ouvrage réunit les actes du colloque « Faim(s) de littérature » organisé du 13 au 15 octobre 2011 à l'Université de Strasbourg. Il a pour but d'interroger « le lien qui unit la démarche de l'ingestion à la démarche de l'écriture » (S. Vierne), mais en mettant au jour les soubassements idéologiques dont la faim, le repas, l'inappétence ou la satiété sont les indices au XIXe siècle. La première section (« Diète littéraire ») explore la relation entre nutrition et création, relation souvent marquée par la concurrence. La « diète », non réduite à son sens étroit d'absence de nourriture, y est comprise comme une manière de vivre (et donc de s'alimenter), permettant d'explorer les liens entre régime littéraire et présupposés physiologiques, potentiellement hygiénistes. La deuxième section (« Le vivre et le couvert ») envisage quant à elle la question du savoir-vivre et tente de circonscrire les usages, majoritairement politiques, du repas comme métaphore de la société : la faim apparaît à la fois comme la résultante d'un appétit mal régulé (conquérant ou avilissant, mais quoi qu'il en soit impérieux), et comme un marqueur social induisant une lecture organique de la société. Enfin, la dernière section (« Goût, dégoût, ragoût ») se concentre sur le langage culinaire de la critique artistique, son axiologie, et sur son lien avec la constitution d'un véritable topos alimentaire au XIXe siècle. Contrairement aux colloques qui ont précédemment étudié les relations entre art et nourriture, la principale perspective retenue ici n'est donc pas anthropologique, ni même philosophique (comme dans l'essai de Jérôme Thélot, "Au commencement était la faim", Encre Marine, 2005). L'art de se nourrir y est envisagé comme la production, quasi au sens tainien, d'un milieu, d'une histoire et d'un système normatif dont les œuvres permettent d'analyser les mécanismes, justement parce qu'elles les mettent en jeu au sein d'une esthétique.