International audience ; Tatarstan, une république test du nouveau fédéralisme russe Par Jean Radvanyi, professeur à l'INALCO, membre du Conseil scientifique de l'Observatoire Le Tatarstan, république de la Volga avec pour capitale Kazan, est à tous égards une des régions (« sujets » en russe) clefs du système fédéral russe. Les Tatares sont la première minorité ethnique du pays et, au début des années 1990, alors que se mettent douloureusement en place les nouvelles institutions russes, ils jouent un rôle déterminant dans la définition des équilibres entre centre et périphéries, ce qu'on dénomme alors le fédéralisme « à la carte ». Cet équilibre précaire est remis en cause dès l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, en 2000, quand celui-ci redéfinit le champ institutionnel de l'ensemble fédéral en réduisant les inégalités consenties par son prédécesseur. Ce processus est arrivé à son terme en 2017 avec le refus de renouveler une seconde fois le « traité de partage des compétences » accordé initialement par Boris Eltsine en 1994. Alors que se jouent les dernières batailles sur la définition des compétences républicaines (à propos de la politique scolaire ou la dénomination du président), les dirigeants de Kazan s'orientent vers d'autres enjeux peut-être plus décisifs pour l'avenir, ceux de la modernisation de l'économie et du partage de ses bénéfices. Boris Eltsine et la naissance du fédéralisme « à la carte » Héritage sur ce plan de la poupée gigogne soviétique, les rapports entre le centre et les différents sujets 1 de la nouvelle fédération de Russie constituent très tôt un enjeu décisif. C'est à Kazan, en août 1990, que Boris Eltsine, à peine élu président du Soviet suprême de la RSFSR (République soviétique fédérative socialiste de Russie), prononce une phrase qui fera date. S'adressant aux dirigeants de ce qui étaient encore des « républiques autonomes », il lance : « prenez autant de souveraineté que vous pouvez en avaler ». Il était alors en concurrence avec le Président de l'URSS Mikhail Gorbatchev et ...
International audience ; Tatarstan, une république test du nouveau fédéralisme russe Par Jean Radvanyi, professeur à l'INALCO, membre du Conseil scientifique de l'Observatoire Le Tatarstan, république de la Volga avec pour capitale Kazan, est à tous égards une des régions (« sujets » en russe) clefs du système fédéral russe. Les Tatares sont la première minorité ethnique du pays et, au début des années 1990, alors que se mettent douloureusement en place les nouvelles institutions russes, ils jouent un rôle déterminant dans la définition des équilibres entre centre et périphéries, ce qu'on dénomme alors le fédéralisme « à la carte ». Cet équilibre précaire est remis en cause dès l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, en 2000, quand celui-ci redéfinit le champ institutionnel de l'ensemble fédéral en réduisant les inégalités consenties par son prédécesseur. Ce processus est arrivé à son terme en 2017 avec le refus de renouveler une seconde fois le « traité de partage des compétences » accordé initialement par Boris Eltsine en 1994. Alors que se jouent les dernières batailles sur la définition des compétences républicaines (à propos de la politique scolaire ou la dénomination du président), les dirigeants de Kazan s'orientent vers d'autres enjeux peut-être plus décisifs pour l'avenir, ceux de la modernisation de l'économie et du partage de ses bénéfices. Boris Eltsine et la naissance du fédéralisme « à la carte » Héritage sur ce plan de la poupée gigogne soviétique, les rapports entre le centre et les différents sujets 1 de la nouvelle fédération de Russie constituent très tôt un enjeu décisif. C'est à Kazan, en août 1990, que Boris Eltsine, à peine élu président du Soviet suprême de la RSFSR (République soviétique fédérative socialiste de Russie), prononce une phrase qui fera date. S'adressant aux dirigeants de ce qui étaient encore des « républiques autonomes », il lance : « prenez autant de souveraineté que vous pouvez en avaler ». Il était alors en concurrence avec le Président de l'URSS Mikhail Gorbatchev et ...
International audience ; Tatarstan, une république test du nouveau fédéralisme russe Par Jean Radvanyi, professeur à l'INALCO, membre du Conseil scientifique de l'Observatoire Le Tatarstan, république de la Volga avec pour capitale Kazan, est à tous égards une des régions (« sujets » en russe) clefs du système fédéral russe. Les Tatares sont la première minorité ethnique du pays et, au début des années 1990, alors que se mettent douloureusement en place les nouvelles institutions russes, ils jouent un rôle déterminant dans la définition des équilibres entre centre et périphéries, ce qu'on dénomme alors le fédéralisme « à la carte ». Cet équilibre précaire est remis en cause dès l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, en 2000, quand celui-ci redéfinit le champ institutionnel de l'ensemble fédéral en réduisant les inégalités consenties par son prédécesseur. Ce processus est arrivé à son terme en 2017 avec le refus de renouveler une seconde fois le « traité de partage des compétences » accordé initialement par Boris Eltsine en 1994. Alors que se jouent les dernières batailles sur la définition des compétences républicaines (à propos de la politique scolaire ou la dénomination du président), les dirigeants de Kazan s'orientent vers d'autres enjeux peut-être plus décisifs pour l'avenir, ceux de la modernisation de l'économie et du partage de ses bénéfices. Boris Eltsine et la naissance du fédéralisme « à la carte » Héritage sur ce plan de la poupée gigogne soviétique, les rapports entre le centre et les différents sujets 1 de la nouvelle fédération de Russie constituent très tôt un enjeu décisif. C'est à Kazan, en août 1990, que Boris Eltsine, à peine élu président du Soviet suprême de la RSFSR (République soviétique fédérative socialiste de Russie), prononce une phrase qui fera date. S'adressant aux dirigeants de ce qui étaient encore des « républiques autonomes », il lance : « prenez autant de souveraineté que vous pouvez en avaler ». Il était alors en concurrence avec le Président de l'URSS Mikhail Gorbatchev et comptait sur le soutien des républiques de la fédération de Russie pour conforter son pouvoir. Les dirigeants tatars ne se le font pas dire deux fois. Ils déclarent la souveraineté de leur république dès le mois d'août 1990 et, après l'éclatement de l'URSS en décembre 1991, votent leur nouvelle Constitution en novembre 1992, précédant ainsi l'adoption de la Constitution fédérale, en octobre 1993. Ce calendrier a l'avantage de leur permettre de définir leur propre cadre sur ce que doit être, selon eux, le nouveau fédéralisme russe. Pour eux, ce sont les « sujets » de la fédération qui doivent être les éléments clefs d'un système conçu de bas en haut. Le Tatarstan est défini comme un Etat démocratique souverain « associé à la Russie » qui dispose de toute la souveraineté sur sa politique intérieure et délègue certaines fonctions (la défense et la sécurité, la politique monétaire et douanière, la politique étrangère) 1 La Fédération de Russie comporte 85 « sujets » en intégrant la Crimée dont l'annexion en mars 2014 n'est pas reconnue par les États occidentaux : 49 oblast (régions), 6 kraï (territoires), 22 républiques, 4 okrougs (districts) nationaux, une région autonome et trois villes fédérales (Moscou, St Pétersbourg et Sébastopol).
International audience ; Tatarstan, une république test du nouveau fédéralisme russe Par Jean Radvanyi, professeur à l'INALCO, membre du Conseil scientifique de l'Observatoire Le Tatarstan, république de la Volga avec pour capitale Kazan, est à tous égards une des régions (« sujets » en russe) clefs du système fédéral russe. Les Tatares sont la première minorité ethnique du pays et, au début des années 1990, alors que se mettent douloureusement en place les nouvelles institutions russes, ils jouent un rôle déterminant dans la définition des équilibres entre centre et périphéries, ce qu'on dénomme alors le fédéralisme « à la carte ». Cet équilibre précaire est remis en cause dès l'arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine, en 2000, quand celui-ci redéfinit le champ institutionnel de l'ensemble fédéral en réduisant les inégalités consenties par son prédécesseur. Ce processus est arrivé à son terme en 2017 avec le refus de renouveler une seconde fois le « traité de partage des compétences » accordé initialement par Boris Eltsine en 1994. Alors que se jouent les dernières batailles sur la définition des compétences républicaines (à propos de la politique scolaire ou la dénomination du président), les dirigeants de Kazan s'orientent vers d'autres enjeux peut-être plus décisifs pour l'avenir, ceux de la modernisation de l'économie et du partage de ses bénéfices. Boris Eltsine et la naissance du fédéralisme « à la carte » Héritage sur ce plan de la poupée gigogne soviétique, les rapports entre le centre et les différents sujets 1 de la nouvelle fédération de Russie constituent très tôt un enjeu décisif. C'est à Kazan, en août 1990, que Boris Eltsine, à peine élu président du Soviet suprême de la RSFSR (République soviétique fédérative socialiste de Russie), prononce une phrase qui fera date. S'adressant aux dirigeants de ce qui étaient encore des « républiques autonomes », il lance : « prenez autant de souveraineté que vous pouvez en avaler ». Il était alors en concurrence avec le Président de l'URSS Mikhail Gorbatchev et comptait sur le soutien des républiques de la fédération de Russie pour conforter son pouvoir. Les dirigeants tatars ne se le font pas dire deux fois. Ils déclarent la souveraineté de leur république dès le mois d'août 1990 et, après l'éclatement de l'URSS en décembre 1991, votent leur nouvelle Constitution en novembre 1992, précédant ainsi l'adoption de la Constitution fédérale, en octobre 1993. Ce calendrier a l'avantage de leur permettre de définir leur propre cadre sur ce que doit être, selon eux, le nouveau fédéralisme russe. Pour eux, ce sont les « sujets » de la fédération qui doivent être les éléments clefs d'un système conçu de bas en haut. Le Tatarstan est défini comme un Etat démocratique souverain « associé à la Russie » qui dispose de toute la souveraineté sur sa politique intérieure et délègue certaines fonctions (la défense et la sécurité, la politique monétaire et douanière, la politique étrangère) 1 La Fédération de Russie comporte 85 « sujets » en intégrant la Crimée dont l'annexion en mars 2014 n'est pas reconnue par les États occidentaux : 49 oblast (régions), 6 kraï (territoires), 22 républiques, 4 okrougs (districts) nationaux, une région autonome et trois villes fédérales (Moscou, St Pétersbourg et Sébastopol).
Un constat fort se dégage des enquêtes sur les connaissances des élèves en math, en sciences et en lecture opérées depuis 30 ans par l'OCDE: la performance de notre enseignement décroche graduellement par rapport à celle des pays voisins et de la Flandre. Quels sont les déterminants probables d'un tel état de fait? Peut-on penser que le niveau des ressources joue un rôle décisif? A vrai dire non. Communautés française et flamande ont dépensé tout au long des années 1990 pratiquement le même montant par élève. Mais les scores des élèves en Flandre sont nettement supérieurs. Nos travaux et ceux de nombreux collègues économistes de l'éducation suggèrent que l'enjeu est avant tout organisationnel. Certes, les ressources budgétaires importent. Il est évident, par exemple, que leur niveau doit garantir la possibilité d'engager du personnel en nombre et qualité suffisants. Mais la majoration des moyens financiers et humains ne constitue nullement une condition suffisante de l'amélioration des performances. Dans l'enseignement plus que dans d'autres secteurs, le mode d'organisation (régulation) semble, en revanche, avoir une forte influence sur la relation ressources/résultats. Que peut-on dire de la situation en Communauté française sur ce plan et quels en sont les enjeux?En bref, nous pouvons dire que le mode de régulation actuel est très insatisfaisant car très hybride. Il repose sur plusieurs conceptions de la régulation. Chacune comporte des faiblesses. De plus, l'articulation qui s'est opérée au fil des ans a été peu réfléchie, mal mise en oeuvre, et se révèle en définitive coûteuse sur le plan des performances. A l'inverse, la Flandre a accompli depuis 1970 un travail discret mais bien effectif de simplification et de clarification de son mode de régulation. L'organisation de l'enseignement en Communauté française comporte tout d'abord une composante concurrentielle (ou "quasi-marché"). Bien que le financement de l'enseignement soit public, les modalités d'octroi de ce financement font apparaître une logique concurrentielle: les parents, les élèves ou étudiants sont en effet libres de choisir leur établissement. Les établissements sont de surcroît financés en fonction du nombre d'inscrits. La faiblesse de ce modèle est qu'il est source d'iniquité, dans la mesure où le libre-choix tend généralement à accentuer le degré de ségrégation des publics entre écoles proches. Il y a par ailleurs en Communauté française une tradition de contrôle par la voie hiérarchique. Les réglementations administratives sont nombreuses dans l'enseignement: horaires, grilles salariales, taux d'encadrement, priorité d'emploi pour les personnels avec ancienneté, . Et la tendance récente est à l'amplification. Or, l'évaluation que les économistes font sur ce type d'interventions est très mitigée. Le contrôle administratif réussit certes à générer une certaine conformité (respect formel des horaires, des taux d'encadrement prévus par la loi,…) mais il échoue à influencer les comportements des enseignants qui déterminent réellement le degré d'efficacité et d'équité du système. La présence simultanée de ces deux modes de régulation antagonistes nuit tant à l'efficacité qu'à l'équité de l'enseignement. La concurrence, pour être efficace, requiert la présence de producteurs libres de choisir l'usage des ressources qui leur paraît le plus indiqué pour répondre à la demande. Or, le contrôle administratif limite fortement l'autonomie des écoles en multipliant règles et procédures à respecter. On peut également douter du fait que le contrôle administratif exerce une action correctrice par rapport aux effets néfastes du libre-choix. Ainsi, peu de mesures administratives en vigueur sont de nature à limiter la ségrégation des publics ou ses effets. L'uniformité des salaires et des modes de gestion du personnel empêche, par exemple, l'octroi de primes salariales aux enseignants s'occupant d'élèves en difficulté. Que faire dès lors?En dépit de toutes les limitations d'un système de libre-choix, et malgré la tendance à la ségrégation des publics qui la caractérise, nous ne croyons pas à son remplacement par un modèle hiérarchique pur, avec, comme en France, une carte scolaire synonyme d'assignation de l'école en fonction du lieu de résidence. Car il y a la question du coût politique de l'abandon du libre-choix de l'école. Mais il y a aussi le risque d'une accentuation de la ségrégation résidentielle. L'option de politique scolaire doit plutôt être celle d'encadrer le système de libre-choix, mais pas via un renforcement du contrôle hiérarchique de type bureaucratique. Il est plus indiqué d'opter, comme en Flandre mais aussi en Finlande ou en Grande-Bretagne, pour un encadrement par voie de contractualisation. Il s'agirait de dissocier plus nettement qu'aujourd'hui les fonctions de contrôle et de production du service éducatif.Aux écoles, il reviendrait de décider plus librement des horaires de présence des professeurs et des élèves, de la durée des cours par matière, du nombre et du type d'enseignants à recruter ou encore de l'opportunité de les envoyer en recyclage. A l'administration, il appartiendrait d'évaluer la performance des écoles. Son rôle principal deviendrait de faire passer aux élèves, à intervalles réguliers, des tests standardisés, à l'image de ceux conçus par l'OCDE. Les résultats à ces tests, pondérés pour tenir compte de l'origine socio-économique des élèves, formeraient la base de l'évaluation des écoles. Et ce n'est qu'en cas d'évaluation négative répétée qu'il y aurait intervention dans la gestion de l'école, par un changement de direction, une mise sous tutelle, …