In: Anthropos: internationale Zeitschrift für Völker- und Sprachenkunde : international review of anthropology and linguistics : revue internationale d'ethnologie et de linguistique, Band 119, Heft 1, S. 235-236
International audience ; Je propose d'analyser ici comment les récits de fondation d'un temple indien (Puri, État de l'Odisha) ont été progressivement traduits dans les termes européens coloniaux de l'Histoire et de la préhistoire. Andrew Stirling (1825), fonctionnaire de la Compagnie britannique des Indes orientales, a été le premier à initier cette relecture, en comparant les chroniques du temple à des « Annales » historiques, et certaines tribus à des habitants pré-historiques de la région. À partir de ce point de depart, je suivrai les trajectoires parallèles des théories sur l'origine du temple et de l'identification d'une antique catégorie sanskrite (śabara) mentionnée dans les chroniques avec des noms tribaux actuels (Sabar/Sora). Les chroniques du temple ont contribué à la diffusion d'une forme de continuité régionale qui posa les bases pour la création d'une Province coloniale séparée (1936), devenu ensuite un État de l'Inde, l'Odisha, et qui inclut les « tribus » ou Adivasi (« aborigènes ») à un niveau subordonné dans l'histoire nationale. Au terme de ce processus, je montrerai comment trois versions divergentes de la légende de fondation du temple et du dieu Jagannath, devenu référence nationale, sont défendues aujourd'hui par des habitants de l'Odisha aux positions socio-politiques contrastées, avant de préciser les points de vue de deux groupes Adivasi (Sora du sud et Sabar du nord) sur cette question. Mon argument est qu'on ne peut comprendre ces revendications et leur forme sans revenir à « l'Archive coloniale » incluant les lectures évolutionnistes de l'histoire du temple ainsi que la politique linguistique qui a présidé à la formation de l'Etat actuel. Je terminerai en examinant comment la construction d'un temple du même dieu Jagannath dans un district du sud (Koraput), et son association avec un groupe Adivasi (les Sora), a été pensée comme une synthèse démocratique, mais peut aussi être vue comme une stratégie d'assimilation culturelle.
Charlotte Schmid, Le don de voir. Premières représentations krishnaïtes de la région de Mathurâ. (The Gift of Seeing: The First Representations of Krsna in the Mathura Area). Ecole française d'Extrême-Orient, monographie n° 193. Paris, 2010, 752 pp., 72 ill., 2 maps. €50. ISBN 978-2-85539-131-1 (paperback).