Du refus du nucléaire aux mobilisations contre le charbon : les mouvements environnementalistes allemands entre bifurcation et imbrication
In: Hérodote: revue de géographie et de géopolitique, Band 194, Heft 3, S. 181-198
ISSN: 1776-2987
Au long de la décennie 1970, alors que l'Allemagne est séparée par le rideau de fer, des mouvements environnementalistes puissants se développent. En Allemagne de l'Ouest le refus de l'implantation des centrales nucléaires réunit agriculteurs, militants pacifistes et écologistes ; à l'Est ce sont les enjeux de qualité de vie face à aux pollutions industrielles qui sont déterminants. Le parti des Verts allemands (Grünen) créé en 1980, est issu de ces mouvements. Il a installé sa légitimité institutionnelle en confortant les mouvements environnementalistes par son action au pouvoir dans les Länder, à l'échelle fédérale ensuite. Autour d'épisodes emblématiques comme le renoncement à construire la centrale de Wyhl, ou l'action des rebelles de l'électricité de Schönau qui préfigurait la transition énergétique citoyenne ( Bürgerenergiewende ), les enjeux énergétiques sont devenus un sujet de débat démocratique. En 2023, la sortie du charbon, et particulièrement du lignite, se pose désormais avec acuité alors qu'un tiers de l'électricité allemande en est issue. De nouveaux mouvements, comme Ende Gelände, nourris par les mobilisations climatiques de la jeunesse dans le monde et en Europe, occupent mines et villages, dénonçant la mollesse des gouvernements et exigeant des engagements immédiats. Alors que les Grünen sont partie prenante du gouvernement depuis 2021, et que la guerre en Ukraine retarde la transition vers une économie décarbonée, ces mouvements déterminés, organisés et médiatiques annoncent une nouvelle étape de l'écologie politique allemande.