La nature sur mesure
In: La Revue du MAUSS, Band 42, Heft 2, S. 191-201
ISSN: 1776-3053
Cet article, qui mêle matériaux ethnographiques et apports philosophiques, propose une critique du processus de marchandisation de la solidarité entre les entités du monde. Le projet moderne repose sur la pratique de la mesure : l'intention est de rendre tout mesurable. Ainsi, ce que l'on reçoit de la nature n'est pas ce qu'elle nous donne puisque notre modalité d'appréciation de ce qui nous est offert respecte la logique de la rationalité comptable qui gouverne désormais la dynamique des relations hommes-milieux. La névrose contemporaine de la quantification monétaire de ce qui circule entre humains et non-humains nous a donc éloignés d'un tout autre projet, qui aurait été de qualifier la nature des liens qui nous unissent au devenir terrien. En substituant la quantité à la qualité, dans des pseudo-programmes d'administration des relations socioécologiques, nous avons renoncé à la valeur du cadeau offert pour ne plus considérer que la quantité de ce qu'il a fallu et faudrait débourser pour réaliser et maintenir le service fourni. Au cœur de cette problématique, est critiquée également la notion d'utilité, puisque ce qui est jugé utile ou non à préserver dépend des instruments de mesure.