Si les approches participatives sont de plus en plus reconnues nécessaires pour impliquer les populations dans la gestion des ressources et des territoires, leur impact reste souvent faible dans la durée, que ce soit à l'échelle locale ou à des échelles plus larges. C'est à partir de ce constat qu'une équipe du Cirad a mis au point une méthode, Self Land Policies, dont les effets à l'échelle locale comme nationale perdurent quinze ans après sa mise en oeuvre au Sénégal. Appliquée à la gestion de territoires locaux, puis à la définition de règles nationales foncières et environnementales, la méthode a impulsé des dynamiques collectives que les acteurs portent d'eux-mêmes et mettent en oeuvre selon leurs propres besoins.
La crise alimentaire mondiale de 2008 a provoqué un mouvement d'investissements fonciers à grande échelle. En Afrique de l'Ouest, l'Office du Niger (ON) est un cas emblématique des investissements fonciers dans l'irrigation. 45 000 exploitations familiales y exploitent 100 000 ha de rizières sur lesquelles ils n'ont jamais obtenu de droits fonciers. Faute de capitaux, l'Etat malien a fait appel aux investisseurs, privés et publics, nationaux et étrangers, pour atteindre l'objectif d'un million d'ha irrigués visé depuis 1932. De nouvelles règles facilitent leur accès à la terre. L'arrivée des investisseurs et les risques d'accaparements ont donné le signal d'une course à la terre où les différents acteurs, investisseurs, paysans, petits et hauts responsables de l'Etat, mettent en oeuvre des arrangements fonciers informels. La thèse montre que ces arrangements ont leurs racines dans l'évolution historique du foncier. Elle analyse le développement des arrangements fonciers en tant que processus d'adaptation à des règles contraignantes ne permettant pas aux acteurs d'atteindre leurs objectifs. Trois types d'arrangements ont pu être identifiés : des arrangements coopératifs, des arrangements néocoutumiers et des arrangements spéculatifs. A travers l'analyse des jeux d'acteurs, la thèse souligne l'importance du rôle des acteurs, mais aussi du contexte socio-politico-spatial dans la construction des arrangements fonciers.
À Madagascar, au-delà de l'abandon fortement médiatisé du gigantesque projet agricole de l'entreprise Daewoo, les appropriations foncières à grande échelle se poursuivent. Mais, à la différence d'autres pays du Sud, une réforme foncière est en cours, fondée à la fois sur la remise en cause de la propriété de l'État sur une large part du territoire et la reconnaissance légale des droits fonciers locaux. Basé sur la théorie de l'accès, cet article analyse les modes d'accès à la terre des investisseurs et leurs régulations. Les investisseurs conduisent de front des négociations informelles et des démarches légales pour accéder à la terre. Mais ces deux voies ne permettent ni l'identification ni le respect de l'ensemble des droits fonciers locaux. En vue de bénéficier des ressources matérielles et symboliques associées au projet agricole, les représentants de l'État, aux niveaux central, régional ou communal soutiennent activement les projets d'investissement, au point parfois, d'en oublier le cadre légal. Mais ces différentes institutions se retrouvent en compétition pour contrôler l'accès à la terre. Cette compétition réactive des enjeux politiques relègue la défense des droits fonciers locaux au second plan et ralentit l'obtention pour les investisseurs d'un bail emphytéotique. Ainsi, certains propriétaires coutumiers recourent à la violence pour maintenir leur accès à la terre tandis qu'en l'absence de reconnaissance sociale, les droits fonciers des investisseurs ne sont pas sécurisés. L'enjeu est non seulement de reconnaître légalement les droits réels des populations locales mais également de prendre en compte de façon effective la diversité de leurs intérêts et surtout, de leurs pouvoirs relativement à la gestion de leurs terres.
En Afrique centrale, les investissements industriels dans l'agriculture augmentent depuis une décennie, constituant l'un des multiples vecteurs de la déforestation. Pour que ces investissements bénéficient au développement socio-économique sans nuire à l'environnement, il est nécessaire de mieux les encadrer. L'analyse des réussites et des échecs dans quatre pays d'Afrique centrale permet de dégager des pistes pour accroître les chances de succès des projets : réaliser des études d'impact indépendantes avant le début du projet ; obtenir le consentement libre, informé et préalable des populations concernées ; inciter les entreprises à répondre aux critères de certification. Les États pourront s'appuyer sur des entreprises respectueuses des hommes et de l'environnement afin de créer une dynamique vertueuse, et pourront ancrer les projets agro-industriels dans des plans d'aménagement du territoire national.
Cet article analyse le gouvernement du foncier en Algérie en retraçant, sur une trentaine d'années, la décollectivisation des terres publiques d'une commune du Bas-Chéliff. Comment l'État a-t-il conduit cette décollectivisation et géré ses conséquences, qui menacent pourtant l'une de ses bases sociales ? Cet article soutient que, à l'encontre de la vision d'un État autoritaire et rentier, la décollectivisation n'a pas été brutalement imposée par le biais d'une modification du cadre juridique (privatisation des terres)et d'une indemnisation des perdants. Soumis à des pressions contradictoires, l'État a plutôt opéré de manière lente e hésitante, en encourageant la subversion rampante de ses propres règles juridiques : d'abord en soutenant financièrement des acteurs privés extérieurs aux terres publiques ; puis en autorisant tacitement ces mêmes acteurs à exploiter en location une partie de ces terres. La redéfinition des acteurs politiquement " marginaux " et " centraux " se déroule alors de manière souple et négociée, à l'écart des rigidités de la loi.
Dans un contexte marqué par l'augmentation des investissements privés et des projets d'exploitations agricoles à grande échelle dans les pays du Sud, l'accès au foncier joue-t-il un rôle nouveau dans les transformations du secteur rural ? L'accès au foncier est-il un déterminant ou un marqueur des évolutions des agricultures ? Cet article introductif fait la synthèse de ce numéro thématique des Cahiers Agricultures qui s'intéresse aux liens entre accès au foncier, investissements et formes de production agricole. Il analyse la façon dont l'accès au foncier est mobilisé et contrôlé par les États, les investisseurs et les communautés d'acteurs locaux pour assurer une production agricole et orienter le développement rural. Il souligne que ni le contrôle du foncier, ni le changement des droits de propriété ne sont des conditions nécessaires à la productivité des investissements privés dans le secteur agricole. Il conclut sur l'importance d'articuler les diverses formes d'agricultures et les diverses sources d'investissements tout en respectant les droits des communautés locales et leurs pouvoirs en termes de gestion foncière.
Le Mali est, comme d'autres pays d'Afrique, touché par le phénomène des investissements fonciers à grande échelle, qualifiés par certains d'accaparements. Dans la zone irriguée de l'Office du Niger, le gouvernement a provisoirement attribué près de 600 000 ha à des investisseurs, étrangers et nationaux, publics et privés. Face au manque de régulation par l'État des ces investissements, qu'il a lui-même sollicités, les sociétés civiles maliennes tentent de s'organiser. En s'appuyant sur l'exemple du projet Malibya, l'article étudie les réactions locales à la mise en oeuvre d'un projet d'investissement. L'analyse des possibilités d'action qui s'offrent aux populations conduit à poser les questions de la gouvernance d'États faibles, de la place des sociétés civiles, de l'avenir de l'agriculture familiale, et de sa cohabitation avec l'agro-industrie.
Le Burkina Faso est un pays sahélien enclavé dont l'économie repose principalement sur l'agriculture et l'élevage qui contribuent pour plus de 30 % à la formation du PIB et occupent plus de 80 % de la population active. L'élevage contribue pour plus de 10 % au PIB. La part des produits animaux, cuirs et peaux compris, dans la valeur des exportations est d'environ 26 % (en 1995) ; plaçant ainsi l'élevage au second rang des recettes d'exportations après le coton. Malgré cette contribution appréciable de l'élevage dans l'économie nationale, notre pays est importateur net de lait et de produits laitiers pour faire face à la demande intérieure. La valeur des importations s'est élevée en 1998 à 9 milliards F CFA. En dépit de ces importations massives la consommation actuelle est de 18 kg d'équivalent lait/habitant/an et est loin de la norme internationale qui est de 75 kg d'équivalent - lait/habitant/an. L'élevage traditionnel comprend 80 à 90 % du cheptel bovin et assure l'essentiel de la production laitière qui est saisonnière. Les fluctuations saisonnières ont une forte influence sur le prix de vente du litre de lait. Ainsi, il varie entre 100 F et 600 F CFA selon la localité et selon la saison. A long terme, le Gouvernement se fixe pour objectif de réduire de moitié le volume des importations de lait et de produits laitiers. Cette volonté politique se manifeste à travers, - l'élection, en juin 1997, du Ministère Délégué Chargé des Ressources Animales en Ministère plein, - L'adoption en novembre 1997, d'une Note d'Orientation de la Politique de développement du Secteur-Elevage au Burkina Faso; l'élaboration en cours du plan d'action du secteur élevage, - la création du Fonds de développement de l'élevage (FODEL); - la mise en oeuvre, avec l'appui de l'Union Européenne (7ème FED) du Programme National Pilote de Développement Laitier (PNPDL), - l'organisation en juin 1998, d'un atelier de réflexion sur la politique laitière au Burkina Faso sous l'égide du PNPDL. La présente communication fait l'économie des grandes conclusions de cet atelier et s'articule autour de deux points. - situation de la filière lait, - perspectives de développement de la filière lait.
Background: Biting midges of the genus Culicoides (Diptera: Ceratopogonidae) are small hematophagous insects responsible for the transmission of bluetongue virus, Schmallenberg virus and African horse sickness virus to wild and domestic ruminants and equids. Outbreaks of these viruses have caused economic damage within the European Union. The spatio-temporal distribution of biting midges is a key factor in identifying areas with the potential for disease spread. The aim of this study was to identify and map areas of neglectable adult activity for each month in an average year. Average monthly risk maps can be used as a tool when allocating resources for surveillance and control programs within Europe. Methods : We modelled the occurrence of C. imicola and the Obsoletus and Pulicaris ensembles using existing entomological surveillance data from Spain, France, Germany, Switzerland, Austria, Denmark, Sweden, Norway and Poland. The monthly probability of each vector species and ensembles being present in Europe based on climatic and environmental input variables was estimated with the machine learning technique Random Forest. Subsequently, the monthly probability was classified into three classes: Absence, Presence and Uncertain status. These three classes are useful for mapping areas of no risk, areas of high-risk targeted for animal movement restrictions, and areas with an uncertain status that need active entomological surveillance to determine whether or not vectors are present. Results: The distribution of Culicoides species ensembles were in agreement with their previously reported distribution in Europe. The Random Forest models were very accurate in predicting the probability of presence for C. imicola (mean AUC = 0.95), less accurate for the Obsoletus ensemble (mean AUC = 0.84), while the lowest accuracy was found for the Pulicaris ensemble (mean AUC = 0.71). The most important environmental variables in the models were related to temperature and precipitation for all three groups. Conclusions: The duration periods with low or null adult activity can be derived from the associated monthly distribution maps, and it was also possible to identify and map areas with uncertain predictions. In the absence of ongoing vector surveillance, these maps can be used by veterinary authorities to classify areas as likely vector-free or as likely risk areas from southern Spain to northern Sweden with acceptable precision. The maps can also focus costly entomological surveillance to seasons and areas where the predictions and vector-free status remain uncertain.
L'objectif de ce séminaire était de mettre en commun un certain nombre d'expériences de pays africains, méditerranéens et latino-américains ayant mis en oeuvre des programmes d'ajustement structurel, et de tirer de cette confrontation des conclusions sur la manière d'aborder le problème de l'ouverture des économies et sur son impact sur les différents secteurs productifs. Après une série d'étude de cas dans différents pays, la création de trois groupes de travail permettant d'approfondir certains thèmes de réflexion (rôle de l'Etat, dynamique de l'ajustement, besoins en informations pour l'évaluation ex ante de l'impact des PAS) est proposée. En annexe figurent les textes présentés lors de ce séminaire
West Africa is one of the regions the most concerned with structural food and nutrition security. Consequently, agricultural development pathways and scenarios are under high scientific and political scrutiny in this region. Rice, as a rapidly growing staple plays a key role in the West African diet representing close to 40% of the total volume of cereal consumed in the region. In the context of the 2008 food price crisis several West African countries have since proclaimed rice self-sufficiency as a target. Here, we show that rice yields tend to be, on average over the entire region, less stable (by a range of 15%–30%) than that of alternative crops, possibly substitutable in diets. The regions where yields of alternative crops are more stable than those of rice correspond to the main climatic regions where these crops are grown: sorghum, millet in the Sahelian and Sudanian regions and tubers in the Guinean region. Rice yields are significantly less stable for 33% of the comparisons considered and are significantly more stable than any alternative crop for 15% of the comparisons in few areas without clear longitudinal patterns. Models accounting for climate variability explain up to 17% of the variance of the data and reveal that yield variability differences between rice and alternative crops tends to widen in the areas where the monsoon precipitation is more variable between-years. The highest levels of variability of rice yields compared to alternative crops are recorded in regions where the monsoon varies strongly between years. Our analysis advocates for an explicit account of yield stability in West African rice expansion scenarios and supply strategies.
Aim To examine the different uses and perceptions of introduced Australian acacias (wattles; Acacia subgenus Phyllodineae) by rural households and communities. Location Eighteen landscape-scale case studies around the world, in Vietnam, India, Re´union, Madagascar, South Africa, Congo, Niger, Ethiopia, Israel, France, Portugal, Brazil, Chile, Dominican Republic and Hawai'i. Methods Qualitative comparison of case studies, based on questionnaire sent to network of acacia researchers. Information based on individual knowledge of local experts, published and unpublished sources. Results We propose a conceptual model to explain current uses and perceptions of introduced acacias. It highlights historically and geographically contingent processes, including economic development, environmental discourses, political context, and local or regional needs. Four main groupings of case studies were united by similar patterns: (1) poor communities benefiting from targeted agroforestry projects; (2) places where residents, generally poor, take advantage of a valuable resource already present in their landscape via plantation and/or invasion; (3) regions of small and mid-scale tree farmers participating in the forestry industry; and (4) a number of high-income communities dealing with the legacies of former or niche use of introduced acacia in a context of increased concern over biodiversity and ecosystem services. Main conclusions Economic conditions play a key role shaping acacia use. Poorer communities rely strongly on acacias (often in, or escaped from, formal plantations) for household needs and, sometimes, for income. Middle-income regions more typically host private farm investments in acacia woodlots for commercialization. Efforts at control of invasive acacias must take care to not adversely impact poor dependent communities.
Nous introduisons les concepts de forums hybrides (ou socio-technique), et décrivons la philosophie sous jacente et la mise en oeuvre d'une des composantes, c.a.d. une plateforme internet pour le partage de connaissances avec la société civile. Nous analysons les résultats après la première année d'opération. Le site http://sahel.info est un portail inspiré des forums en ligne populaires et est construit autour d'un gestionnaire de contenu gratuit appelé Coranto. En 2004 nous avons mis en ligne 124 éléments d'actualité sur les politiques, 1' économie, la recherche/universités, et les zones rurales du Sahel. Nous avons seulement enregistré le site sur le moteur de recherche Google et ne l'avons pas publicisé, et cependant il a été visité par plus de 1000 personnes différentes qui ont consulté 8500 pages (1000/mois) et voté 1200 fois au total (c.a.d. donné leur appréciation sur les articles). L'analyse des informations les plus (ou moins) consultées ou appréciées permet de cibler les thèmes d'intérêt pour les projets de recherche et de développement comme le DMP. Maintenant que la phase de prototypage est complétée nous allons pouvoir publiciser le site et attirer de nouveaux éditeurs. Le site http://dmp.sahel.info , basé sur la même plateforme que Sahel info, permet de partager les résultats et les informations spécifiques au DMP.
Unravelling the dynamics of land-use change is key to assess the environmental and socioeconomic impacts of land-based strategies regarding climate or energy. In this prospect, this paper proposes an analytical decomposition of land-use change resulting from a shock in agricultural demand which takes into account indirect effects from price signals. This analytical equation is numerically estimated using a global model of land-use combining biophysics and economics. While being relatively simple, this model captures the main processes of land-use change: change in the intensive and extensive margins, international trade, change in intermediary demand and possible by-products. At the global scale, our results show that yield losses due to the conversion of marginal land amount approximately to half of yield gains due to fertiliser use. At the regional scale, patterns of yield and area responses are depicted by assessing the potentials for intensification (yield gaps) and extensification (areas of extensive pastures) given the future pathways of agricultural demand.
Background: Biting midges of the genus Culicoides (Diptera: Ceratopogonidae) are vectors of bluetongue virus (BTV), African horse sickness virus and Schmallenberg virus (SBV). Outbreaks of both BTV and SBV have affected large parts of Europe. The spread of these diseases depends largely on vector distribution and abundance. The aim of this analysis was to identify and quantify major spatial patterns and temporal trends in the distribution and seasonal variation of observed Culicoides abundance in nine countries in Europe. Methods: We gathered existing Culicoides data from Spain, France, Germany, Switzerland, Austria, Denmark, Sweden, Norway and Poland. In total, 31,429 Culicoides trap collections were available from 904 ruminant farms across these countries between 2007 and 2013. Results: The Obsoletus ensemble was distributed widely in Europe and accounted for 83% of all 8,842,998 Culicoides specimens in the dataset, with the highest mean monthly abundance recorded in France, Germany and southern Norway. The Pulicaris ensemble accounted for only 12% of the specimens and had a relatively southerly and easterly spatial distribution compared to the Obsoletus ensemble. Culicoides imicola Kieffer was only found in Spain and the southernmost part of France. There was a clear spatial trend in the accumulated annual abundance from southern to northern Europe, with the Obsoletus ensemble steadily increasing from 4000 per year in southern Europe to 500,000 in Scandinavia. The Pulicaris ensemble showed a very different pattern, with an increase in the accumulated annual abundance from 1600 in Spain, peaking at 41,000 in northern Germany and then decreasing again toward northern latitudes. For the two species ensembles and C. imicola, the season began between January and April, with later start dates and increasingly shorter vector seasons at more northerly latitudes. Conclusion: We present the first maps of seasonal Culicoides abundance in large parts of Europe covering a gradient from southern Spain to northern Scandinavia. The identified temporal trends and spatial patterns are useful for planning the allocation of resources for international prevention and surveillance programmes in the European Union.