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En matière de commerce international, il y a un décalage entre les économistes, favorables dans leur immense majorité au libre-échange, car il augmente le pouvoir d'achat et la productivité, et les hommes politiques, qui se gargarisent d'expressions comme « patriotisme économique » pour justifier un protectionnisme plus ou moins honteux se voulant un moyen de défendre l'emploi et de lutter contre le chômage. L'expérience historique, y compris récente, a confirmé le point de vue des économistes.

Résumé Cet article discute un ensemble d'études présentées au Congrès international d'histoire économique de Berne (août 1986). L'économie mondiale est définie comme le réseau de marchés, dispersés à travers le monde, qui sont intégrés les uns aux autres, entre lesquels il y a cohérence des prix. Certains auteurs soutiennent qu'une économie mondiale s'est formée, assez soudainement, dans la seconde moitié du XIXe siècle. En fait, des marchés mondiaux intégrés sont apparus, les uns après les autres, pour un certain nombre de denrées, depuis la fin du Moyen Age, et il existait une économie mondiale au XVIIIe siècle. Le développement spectaculaire après 1850 fut l'essor des trafics intercontinentaux de produits primaires, et notamment de quelques denrées alimentaires de climats tempérés - surtout le blé ; mais il ne faut pas surestimer les conséquences de ce phénomène pour les économies des « vieux pays ». De plus, divers développements dans le sens d'une intégration accrue sont intervenus relativement tard, à l'extrême fin du XIXe siècle, voire au début du XXe, quand les marchés mondiaux tels que nous les connaissons ont émergé ; mais en 1914 encore, de vastes régions restaient en dehors de l'économie mondiale. Les innovations technologiques en matière de transports et de communications ont joué un rôle capital dans l'intégration des marchés, mais la baisse des coûts de transaction a été un phénomène de longue durée, et la révolution des transports maritimes n'est pas le seul facteur à considérer. Au total, cet article plaide en faveur du gradualisme : la formation de l'économie mondiale a été un processus lent et progressif — mais aussi saccadé.