Open Access BASE2021

Le romantisme de l'interdisciplinarité

Abstract

International audience ; Le romantisme de l'interdisciplinarité Il est un paradoxe ancré au coeur du romantisme, trop souvent passé inaperçu. Comme l'a montré de manière magistrale l'ensemble des travaux historiques de Paul Bénichou 1 , la littérature romantique hérite, dans des sociétés occidentales ayant entamé depuis la Renaissance un long processus de laïcisation, de la mission spirituelle qui était depuis le moyen âge celle de la religion : c'est le processus que Bénichou a appelé le « sacre de l'écrivain », le mot de « sacre » ne renvoyant pas à une quelconque « sacralisation » culturelle, selon l'interprétation abusivement sociologique qui est généralement faite de cette (trop ?) belle formule, mais bien à la mission sacerdotale que l'écrivain, censé habiter les hautes sphères de la pensée, doit assumer face aux peuples européens, eux-mêmes en voie de prise de conscience politique. La littérature est donc doublement vénérable : en tant qu'équivalent profane du questionnement théologique et qu'incarnation de l'esprit national. Quant à la France qui, avec la Révolution française, a brisé le plus brutalement le fil de la continuité religieuse et se veut aussi, pour les nations et les républiques à venir, modèle et source d'inspiration, elle est prête, plus que toutes les autres, à vouer un culte à ses grands écrivains : pour continuer à emprunter à Paul Bénichou son vocabulaire, le « temps des prophètes » est venu pour elle. Mais, dans le même temps, la liberté intellectuelle, acquise au moins dans son principe dès 1789, favorise l'extraordinaire développement d'un esprit de curiosité scientifique dont la philosophie des Lumières avait donné les prémices. Ici, le mot de science ne renvoie pas seulement au domaine des sciences exactes, même si le 19 ème siècle fut sans doute, en ce qui concerne la France, son âge d'or pour les savants, mais à tout ce que nous nommons aujourd'hui les sciences humaines et sociales-en particulier, la philosophie, l'économie, les sciences politiques, la sociologie, même si, bien entendu, ces disciplines ne sont pas encore clairement identifiées comme telles 2. De ce point de vue, réduire la littérature de la Restauration, comme le fait traditionnellement l'histoire littéraire, à l'assomption d'une brochette de poètes « romantiques », aussi admirables soient-ils, aboutit à un véritable contresens qui manque l'essentiel : la vitalité d'une intense activité théorique où se formeront tous les intellectuels destinés à occuper le premier rang pour le demi-siècle à venir (Victor Cousin

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